Pour la première publication de cette nouvelle rubrique, nous vous proposons de (re)découvrir un article sur celui sans qui le Groupe ADSN n'existerait probablement pas : Maître Cachia (extrait du livre UNE MEMOIRE DES VOLONTES : 40 ans de progrès au service du notariat paru en 2011)


Lorsque la rumeur d’une visite de François Cachia se propage dans les bureaux de l’ADSN, les « anciennes », celles qui ont connu les débuts du Fichier, ont toutes les mêmes mots : « Maître Cachia, c’est quelqu’un ! ».

Respect dans le ton de la voix, admiration dans les regards, François Cachia a marqué les esprits tant pour ses qualités humaines que pour sa pugnacité. Un personnage atypique qui n’était pourtant pas destiné au notariat. « Mon père était notaire, nous étions deux frères, et il était de coutume que ce soit l’aîné qui reprenne l’étude. De mon côté, je suis donc devenu avocat ». Deux ans plus tard, son frère, débordé par ses engagements pour la formation de la profession, lui demande de le rejoindre. François Cachia quitte la robe pour devenir notaire : « Mon frère était un théoricien, il vivait dans les hautes sphères et moi, j’étais un praticien, j’aimais avoir les mains dans le cambouis. » L’équilibre est tout trouvé.



Très vite impliqué dans la vie de la profession, c’est en 1971 qu’il va définitivement marquer l’histoire du notariat.

Et pour cause : entouré d’une petite équipe, avec le soutien du conseil régional d’Aix en Provence, il lance à Aix ce qui deviendra plus tard le Fichier central des dispositions de dernières volontés (FCDDV). Pour autant, l’homme a le triomphe modeste : « C’est Jacques Vialard qui a initié l’idée dans son rapport à l’Assemblée de liaison en 1954. » Seize ans plus tard, alors que la Conférence du Plan incite ses délégués à réfléchir à de nouvelles actions de développement, il propose au conseil régional d’Aix en accord avec Louis Coddaccioni, délégué de la Cour au Conseil supérieur, de développer le Fichier des testaments et le fichier immobilier en liaison avec les cours de Nîmes et Bastia.

Cette proposition adoptée, François Cachia passe à l’action. Quoi de plus normal pour cet homme qui se définit avant tout comme un praticien ?



Après avoir examiné de près les modèles de fichiers belge et espagnol, il met au point son propre système : une petite fiche cartonnée pour le classement. Raoul Raymond, secrétaire général du conseil régional, suggère une pince à tiercé pour le traitement et… des boites à cigares pour le rangement, puis Christiane Mouren notaire à Marseille, étudie l’achat d’un fichier rotatif manuel ! Le FCDDV est né.                 


Dans le même temps, l’idée faisait non seulement son chemin en France, mais en Europe. André Vaccharezza notaire au Mans, représentait alors le France dans la commission chargée de la mise en place d’un fichier européen, dont les travaux aboutiront à la Convention de Bâle le 16 mai 1972 par les Etats membres du Conseil de l’Europe. « Nous avons décidé de démarrer sans attendre le feu vert du CSN. Il fallait faire bouger les choses, s’amuse l’ancien. Encore fallait-il convaincre les confrères de l’utilité du Fichier. A force de persuasion, grâce au soutien de nombreux présidents de Cour, à l’action des clients eux-mêmes, sensibilisés par les publicités dans les journaux, à la radio et la télévision, les adhérents nous ont rejoints rapidement. »


En 1974, un très grand nombre de conseils régionaux avaient adhéré au Fichier. Précisions que Maître Cachia n’avait laissé aucun argument de côté, à commencer par le prix : dix francs pour chaque nouveau dépôt et la gratuité pour tous les anciens. « Pour que que le Fichier soit pertinent, il fallait rassembler le maximum de données ; nous demandions donc aux notaires de remonter sur les trente dernières années. Et pour qu’ils jouent le jeu, nous avons appliqué la gratuité. » Pari gagnant. Très rapidement après sa création, le Fichier reçoit plus de soixante fiches par jour. Face à l’ampleur du succès, la gestion d’un fichier purement manuel devient complexe. En 1975, François Cachia comprend que son fichier prend une dimension nationale. Il met alors un partenariat avec la Compagnie internationale de services en informatique (Cisi), prestataire informatique du Commissariat à l’énergie atomique (ce qui associe de fait le Fichier à une administration d’Etat) située près d’Aix, et disposant à Cadarache de l’ordinateur le plus puissant d’Europe, parfait pourgérer l’informatisation du Fichier. C’était Gagné. Quelques mois plus tard, le CSN prenait la main sur le Fichier sans remettre en question l’organisation ni le lieu. En 1983, la création de l’ADSN modifie surtout la gestion comptable du Fichier. Le Fichier informatisé fonctionne sans difficulté, sous la houlette de Geneviève Puech, durant plus de vingt ans. Dans les années 2000, si les nouvelles technologies permettent de faciliter le quotidien des notaires et de sécuriser les échanges, l’idée initiale demeure inchangée. « Si tout a pu fonctionner, c’est uniquement grâce à notre petite équipe qui est toujours restée très soudée », confie humblement Maître Cachia.

Sa plus grande satisfaction ? La création de l’Association du réseau européen des registres testamentaires (ARERT) en 2005 : « je n’aurai jamais imaginé ça au départ. »  Ses regrets ? « Dans le notariat, il faut toujours attendre au moins dix ans pour voir une idée se concrétiser. Par exemple le fichier des cautions devrait exister depuis quarante ans, celui des assurances aussi. » A bon entendeur… 


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